Étude de faisabilité et conception détaillée de la sécurisation du schéma directeur d’eau potable du système Naute-Keetmanshoop
Le projet a pris forme en 2016 lors de la visite en France du Président de la Namibie, le Dr. Hage Geingob, qui a rassemblé les autorités Namibiennes, l’Ambassade de France en Namibie et Altereo pour évoquer les problèmes urgents relatifs à la production et distribution d’eau dans le pays et notamment pour faire face aux problèmes de vieillissement des réseaux et à la recrudescence des fuites.
C’est ainsi qu’en janvier 2017, Altereo entreprit une première mission en Namibie. Il s’agissait de réaliser le diagnostic de la canalisation d’adduction de la ville principale qui s’est avérée être en très bon état. Altereo a alors réalisé le diagnostic d’une autre canalisation d’adduction dans la région de Karas, au sud du pays, qui a révélé, cette fois, des besoins importants d’intervention.
Au moment de la conception du projet (en 2016), la Namibie fait face à de sérieux problèmes concernant l’eau. Le pays connaît sa plus grande sécheresse depuis 90 ans avec la quasi-totalité des barrages vides, à l’exception de la zone d’étude ciblée par Altereo (dans le Sud) pour justement préserver et optimiser les ressources encore mobilisables.
Pour pallier à cela, la Namibie entreprend des projets tels que la création d’une deuxième usine de dessalement sur la côte, en tirant un pipeline de 350 km vers Windhoek avec plus de 700 m de dénivelé pour amener de l’eau potable à Windhoek. Ces projets sont colossaux en raison de l’état d’urgence annoncé depuis février 2019. Les habitants doivent respecter un certain nombre de consignes, comme ne pas arroser son jardin ou ne pas laver sa voiture.
Le prix de l’eau est également très élevé pour le pays : 2,50 € le m³. Ce qui n’est pas loin des tarifs français, sachant que le salaire minimum Namibien est aux alentours de 50 €/mois.
Objectifs de la mission
Les missions prospectives d’Altereo en Namibie ont permis d’identifier des zones géographiques prioritaires dont le secteur du Karas et son chef lieu, la ville de Keetmanshoop.
Il a alors été décidé d’inclure au projet de la municipalité de Keetmanshoop :
Description des missions
Mission A : Diagnostic du système d’adduction
Remplacement de la canalisation d’adduction
La collecte de données a été réalisée à l’aide de campagnes GPS et drone pour localiser les 109 regards, réaliser un levé photographique haute précision (100 m de large) le long des 45 km de conduite existante et créer un Modèle Numérique de Terrain.
Depuis 2009, 68 fuites ont été enregistrées sur cette conduite.
Un formulaire d’enregistrement des fuites a été créé avec l’application mobile KIS® Collect. Un appel d’offre a été élaboré et livré au client pour renouveler la canalisation : dessins techniques, phasage des travaux, coûts, etc.
Diagnostic des ouvrages d’adduction : station de traitement, stations de pompage et réservoirs
Un panel d’experts Altereo est intervenu pour réaliser l’audit des ouvrages existants, établir les diagnostics détaillés et définir les améliorations au travers de travaux de réhabilitation chiffrés en prenant en compte le développement à horizon 2040 de la ville.
La canalisation parcourt 45 km entre le barrage et la ville de Keetmanshoop. Le parcours compte 3 stations de pompage, un barrage, une station de traitement et quelques réservoirs. La canalisation quant à elle est en acier de diamètre 400 mm et date de 1971. Il s’agit d’une canalisation très bien posée à l’époque mais avec quelques erreurs de parcours où certaines sections ne sont pas enterrées mais posées à même le sol.
Optimisation du système de télégestion des ouvrages d’adduction
Une analyse globale a été menée sur le système de télégestion et de supervision existant : SCADA (Supervisory Control and Data Acquisition), sondes de niveau, manomètres, débitmètres, etc.
Des propositions chiffrées ont été établies pour améliorer et faciliter la gestion des équipements existants.
Installation d’une unité de gestion du patrimoine
Des plans d’origine du réseau d’eau ont été convertis et transférés vers KIS, le système d’information géographique d’Altereo, avant d’être enrichies par les investigations de terrain. Un formulaire d’enregistrement des fuites a également été créé sur l’application KIS Collect et mis en service dans la municipalité.
Diagnostic du système de distribution d’eau : mesures, modélisation hydraulique, suivi de nuit
Une campagne de mesure a été réalisée sur le réseau d’eau de Keetmanshoop via l’analyse de compteurs généraux déployés dans le cadre du projet, d’enregistreurs de pression et de sondes de niveau.
Le suivi des débits de nuit a permis d’estimer le taux de pertes et d’orienter la campagne de localisation précise des fuites.
Un modèle hydraulique a également été construit et calé afin d’étayer le diagnostic et tester les aménagements envisagés.
Des loggers de pression ont été posés sur tout le réseau. Des fuites et pressions ont ainsi pu être recensées.
Le graphique ci-dessous permet l’observation d’une fuite. La pression chute complètement et brusquement en quelques heures
Stratégie optimisée de renouvellement du réseau avec l’IA d’Altereo HpO®
L’historique des fuites a été exploité avec le système expert HpO® qui utilise l’intelligence artificielle pour déterminer le risque de fuite à l’avenir pour chaque canalisation du réseau. Un programme de renouvellement optimisé du réseau, tenant compte de ce critère de risques et d’autres paramètres de choix, a été bâti avec d’HpO®.
Schéma directeur 2040
A l’aide du diagnostic, des résultats de modélisation hydraulique et du programme optimisé de renouvellement, le schéma directeur 2040 eau potable a été bâti, intégrant la croissance démographique et la demande future en eau du territoire d’étude, Il vise à améliorer durablement le service aux usagers et préserver la ressource en eau via un programme pour les 20 prochaines années.
Conclusions
Mission A : Diagnostic du système d’adduction
Au total, pas moins de 6 994 000 €HT (~$N 112,839,000 HT) seront nécessaires pour le renouvellement de la canalisation d’adduction entre le barrage de Naute et la ville de Keetmanshoop. Et 1 857 000 €HT (~ $N 29,950,000 HT) pour la réhabilitation de la station de traitement et des différents réservoirs qui composent l’adduction (réservoir de la station de traitement, réservoir de la station de pompage intermédiaire ainsi que les 3 réservoirs terminaux).
État du réseau au début de l’étude
Le rendement a été évalué à 50% sur le réseau de la ville. Cela a représenté en 2018, 120 m³/h de fuites et une perte nette d’un million d’€HT ($N 16,000,000 HT) pour la ville, compte tenu du prix d’achat de l’eau à Namwater.
Amélioration de la connaissance du réseau d’eau potable et de son rendement
Avant l’étude, environ 22 km de canalisations étaient inconnus des services de la municipalité (matériaux, diamètre, profondeur, etc.). Aujourd’hui, la totalité du réseau est connue et intégrée dans le SIG KIS®.
De plus, suite au déploiement de compteurs de sectorisation du réseau d’eau potable et à la réalisation de différentes campagnes de recherche de fuites avec les équipes de la ville, une diminution de plus de 16% du débit minimum nocturne a été observée entre le début et la fin de l’étude. Cela représente environ 300,000 m³/an soit une économie annuelle de 280,000,00 €HT ($N 4,500,000 HT).
Le schéma directeur établi vient compléter le dispositif d’amélioration du réseau via une meilleure organisation du services, de formations, de renouvellement d’infrastructures etc.
Renouvellement optimisé des réseaux grâce au ciblage par l’IA HpO®et schéma directeur 2040
HpO® a analysé 260 fuites (881 canalisations, 150 km). L’IA HpO® a été entraînée avec des données de fuites sur 4 ans (2014-2017) et vérifiée avec les données de fuites sur 2 ans (2018-2019).
La courbe de prévision du risque de défaillance produite par HpO®, montre que remplacer 15% des canalisations permettrait d’éviter près de 70% des défaillances. Ce remplacement stratégique fera économiser plusieurs centaines de milliers d’euros à la municipalité d’ici à 2040.
Au total, il est estimé que 6 500 000 €HT seront nécessaires pour mener à bien le schéma directeur de la municipalité : sécurisation du réseau actuel et futur, programme de renouvellement et formations.